Excursion du 29 août 2015

Bourges (18)

Cette 86e excursion de notre Société a réuni 68 personnes et s’est déroulée à Bourges, une ville au patrimoine historique et architectural exceptionnel. Chacune des visites prévues a été particulièrement bien détaillée grâce aux commentaires érudits des intervenants, ce qui en a fait une journée très dense pour les participants qui ont été divisés en deux groupes.

Toute la matinée a été consacrée à la cathédrale Saint-Étienne dont l’originalité et l’importance dans le développement de l’art gothique lui ont valu d’être inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco en 1992.

En 1195, Henri de Sully, archevêque de Bourges, frère d’Odon de Sully, évêque de Paris, qui a pris une large part à la construction de Notre-Dame, fait une donation au chapitre pour construire une cathédrale de grande envergure sur l’emplacement de la cathédrale romane qui avait elle-même succédé à des édifices plus anciens. Ce sera la première cathédrale gothique située au sud de la Loire, rivalisant avec Notre-Dame, véritable figure de proue du royaume capétien, ce qui explique ses dimensions et sa magnificence. Sa construction s’est faite en deux campagnes entre 1195 et 1255. Elle mesure 120 m de long pour 41 m de large, ce qui en fait la plus large des cathédrales gothiques. Sa hauteur sous voûte au niveau central est de 37 mètres.

Les grands piliers font 17 m de hauteur. L’édifice s’étend sur 5 900 m2 et se développe au-delà du mur d’enceinte gallo-romain, débordant des fossés, d’où la construction d’un soubassement appelé à tort crypte qui anticipe le plan du chevet. C’est l’église basse dans laquelle nous nous sommes longuement attardés. Il faut dire qu’elle recèle quantité de chefs-d’œuvre. Citons le tombeau de Jean de Berry en marbre de Carrare, un ensemble sculpté du XVIe siècle représentant une Mise au tombeau, ainsi que les restes du jubé de la cathédrale récemment restitués à Bourges. Ce dernier, impressionnante frise de pierre du XIIIe siècle, qui a connu bien des dommages, avait eu pour fonction de séparer le chœur liturgique de la nef. Outre les tombes d’évêques de Bourges, on a aussi remarqué, tracée sur le sol, grandeur nature, une épure de la rosace (façade occidentale) et des marques de tâcherons sur les murs sans oublier l’architecture impressionnante, notamment, celle des piliers (2 m de diamètre), destinée à soutenir le chœur.

En remontant au niveau de la cathédrale, après avoir apprécié l’harmonie de l’ensemble et la luminosité accentuée par cette journée ensoleillée, la guide a détaillé quelques vitraux. Leur nombre permet de suivre l’évolution de cet art sur plusieurs siècles. Dans le chœur, les plus anciens représentent des scènes religieuses mais aussi les métiers de l’époque à l’initiative des corporations. Quant à ceux qui ornent les chapelles latérales, ils datent du XIVe au XVIIe siècle et on les doit aux familles des notables de Bourges. C’est le cas de la chapelle Jacques Cœur où est magistralement représentée l’Annonciation.

Avant la sortie, exceptionnellement, nous avons eu le droit de pénétrer dans la sacristie où se trouve le Trésor de la cathédrale. Il se compose d’objets liturgiques en cuivre, en argent ou en or : croix et crosse épiscopales, anneau pastoral, calice, patène pour les hosties...

À l’extérieur, on n’a pu qu’être impressionné par les cinq portails de la façade occidentale correspondant aux cinq nefs qui structurent l’édifice, celui-ci ayant la particularité de ne pas posséder de transept. Le portail central représente le Jugement dernier ; il est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de la sculpture du XIIIe siècle. Notre guide a alors évoqué les deux tours de hauteurs inégales qui encadrent cette façade, Tour Sourde et Tour de 86e EXCURSION 535 Beurre avec les vicissitudes qu’elles ont connues au cours de leur histoire.

L’heure du repas approchant, c’est en parcourant les rues de la vieille ville que tout le groupe s’est retrouvé au restaurant « Le Sénat » fondé en 1866. Il doit son nom aux réunions politiques qui s’y tenaient à la fin du XIXe siècle.

Nous avons fait ensuite une balade commentée dans les vieux quartiers. On sait la cité bâtie sur une petite butte calcaire et la ville actuelle conserve la structure déterminée par le rempart gallo-romain. Son pourtour a conditionné l’évolution des rues médiévales, séparant la ville haute avec ses demeures aristocratiques et la ville basse marchande, ce qui est encore très visible dans le bâti.

Courte halte à l’hôtel des Échevins qui se compose de deux parties au style architectural contrasté. On retiendra la tour octogonale, style gothique flamboyant de la fin du XVe siècle. Cet ancien hôtel de ville abrite aujourd’hui une centaine d’œuvres de Maurice Estève (1904-2001), peintre autodidacte né dans le Cher, dont la notoriété dépasse nos frontières.

Autre visite libre celle de l’hôtel Cujas où se situe depuis 1892 le musée du Berry. Compte tenu du temps disponible, nous nous sommes limités au rez-de-chaussée qui présente de nombreux vestiges gallo-romains : vaisselles de bronze, de terre cuite, peintures murales, mosaïques et plus de 200 stèles dans une salle lapidaire. Le groupe a aussi été très intéressé par l’exposition temporaire « Portraits impériaux » qui se compose de photos de pièces de monnaie sur lesquelles sont gravés des visages d’empereurs romains. Le concepteur de l’exposition, Michel Saillant, a pu répondre à la curiosité des excursionnistes creusois.

Tout en continuant la découverte de la ville, les participants se sont ensuite rendus au Palais Jacques Cœur pour une visite guidée. C’est là un des plus impressionnants édifices de l’architecture civile gothique. Bien évidemment, la guide ne pouvait qu’évoquer la personnalité hors du commun de celui qui l’a fait construire. Né à Bourges à la fin du XIVe siècle, Jacques Cœur a réalisé une des plus belles ascensions sociales de notre histoire. D’origine modeste, cet homme ambitieux et opportuniste est devenu, grâce à son génie des affaires dans les domaines les plus divers, une des plus grandes fortunes de France. Homme de confiance de Charles vii, il s’est vu confier la tâche de grand argentier du Royaume, l’équivalent de notre ministre des Finances. Mais sa disgrâce a été tout aussi retentissante et, s’il a été anobli en 1451, il a été condamné à mort en 1453, s’est évadé et a disparu à l’île de Chio en 1454.

Ceci explique qu’il n’a jamais résidé dans ce palais dont il avait entrepris la construction en 1443. Si la façade occidentale est d’allure sévère, elle contraste avec la riche ornementation et la grâce qui se dégage de la façade orientale. De nombreuses parties de l’édifice arborent les armes de Jacques Cœur dont la fameuse devise était « À cœur vaillant, rien d’impossible ».

La guide nous avait concocté un parcours dans une partie de cet immense palais. La décoration intérieure qui témoigne de la réussite exceptionnelle de l’homme a impressionné les Creusois. On a noté que si les salles sont aujourd’hui dépourvues de mobilier, l’art contemporain y est présent en 2015 avec une trentaine d’œuvres d’artistes différents qui s’expriment sur le thème : « Genre humain ».

Enfin, à deux pas de là, tout le groupe s’est retrouvé à l’hôtel de Panette, édifice construit en 1418 en tant qu’hôtel particulier des Trésoriers de la Sainte- Chapelle et aujourd’hui complètement restructuré. Dans la cour, sous les ombrages, l’Office de tourisme nous a offert des rafraîchissements bienvenus en cette fin de journée caniculaire. Il faut souligner que son directeur n’est autre qu’un Creusois, notre confrère Alain Ferrandon, qui s’est beaucoup investi avec toute son équipe dans l’organisation des visites.

Jean-Pierre Verguet